Tu as peut-être vu passer ce nom dans les médias dernièrement, et ce n’est pas pour rien. Il s’agit d’une nouvelle centrale hydroélectrique en Valais, au dessus de Le Châtelard, tout juste finalisée cette année! Alors que se posent les questions de l’alimentation énergétique suisse pour moins dépendre du gaz et mazout, découvrons quelque peu cette nouvelle source de production électrique.
Un peu d’histoire
À l’origine, Il y avait une belle vallée, toute proche de la frontière française. Comme quelques autres endroits, la vallée s’est vu implantée un gros mur en béton destiné à noyer l’alpage, permettant ainsi la création d’un lac artificiel dont les eaux serviraient à produire du courant électrique. Un premier barrage voit le jour en 1920, le barrage de Barberine. Trente ans plus tard, un autre barrage est construit dans une vallée latérale surplombant l’alpage d’Émosson. C’est celui qu’on appelle aujourd’hui le Vieux Émosson, et l’un des acteurs majeurs du projet Nant de Dranse. En 1972, la construction d’un troisième barrage (le grand, celui qu’on voit aujourd’hui) s’achève: c’est le barrage d’Émosson, qui noie complètement l’ancien site de Barberine.
Découvre mes meilleurs conseils d’exploration!
Inscris-toi maintenant et reçois mon guide des meilleurs conseils d’explo!
Cinquante ans plus tard
- La consommation d’énergie a beaucoup augmenté depuis 1972
- La demande va continuer de croître, alors qu’on souhaite désactiver nos centrales nucléaires (qui reste les plus efficaces en terme de production).
- On recherche justement des solutions propres pour produire du courant.
- La stabilité de l’approvisionnement en électricité est incertaine, l’accord-cadre avec l’Union Européenne arrivant à échéance en 2025 (l’EU fournit une part importante du courant à la Suisse).
Heureusement, la Suisse a tout de même du gros potentiel en optimisant des infrastructures déjà en place! C’est ce qui a été fait ici, avec la centrale de Nant de Dranse.
Fonctionnement de la centrale Nant de Dranse
En fait, la nouvelle centrale hydroélectrique va utiliser les eaux du barrage du Vieux Émosson, qui se trouve donc au-dessus du Lac d’Émosson (le grand). Tu t’y retrouves? 😅 Les eaux passeront par des turbines qui actionneront des alternateurs et produiront le courant, avant de finir dans le lac d’Émosson. Ça, c’est le principe du turbinage, celui qui est employé par tous les barrages. Mais la nouvelle centrale va plus loin!
Le complexe Nant de Dranse adopte en effet la technologie de pompage-turbinage, ce qui signifie qu’elle peut réalimenter en eau son lac de retenue par pompage. En gros, l’approvisionnement du lac ne dépend ainsi plus uniquement des sources et fontes en amont du lac. Ici, la nouvelle source d’où seront pompées les eaux n’est autre que le lac d’Émosson, celui-là même où finissent les eaux issues du turbinage présentant juste avant.
Nous avons donc ici la mise en place d’un circuit fermé qui permet d’utiliser l’eau de façon très intelligente, sans la laisser filer jusqu’à la mer. Couplé au fait que les eaux du turbinage finissent dans un barrage qui peut lui-même turbiner à son tour le contenu de son lac, c’est un véritable réservoir d’électricité qui se cache (en partie) sous les sommets dominant Le Châtelard.
Un rôle d’équilibriste
Avec ce système, la centrale Nant de Dranse joue un rôle très important:
- Lorsque la demande en électricité est plus importante que ce que permet le réseau, les vannes du barrage du Vieux Émosson sont ouvertes pour accroître la production de courant et assurer la distribution
- Lorsque le courant présent sur le réseau excède les besoins, le complexe de production va l’employer pour pomper l’eau du Lac d’Émosson et l’amener au Vieux Émosson, rechargeant ainsi le réservoir pour le prochain pic de demande.
Ainsi, la stabilité du réseau et de la fourniture énergétique est assurée de façon cyclique. Cela ne peut évidemment pas fonctionner à l’infini, il y aura toujours des pertes en raison de l’évaporation ou autre, mais les réservoirs d’eau sont employés avec grande intelligence sans réel impact supplémentaire sur le paysage (il a tout de même fallu réhausser le vieux barrage et installer des prises d’eau dans le lac d’Émosson, et ces chantiers ont eu quelques répercussions sur le paysage qui a été renaturé soigneusement par la suite).
Une réserve d’eau, mais pas seulement
Tu connais le fonctionnement de la nouvelle usine, mais elle abrite encore une spécificité! L’une des cavernes de cet immense complexe héberge en effet un système de stockage d’électricité. D’une capacité de 20 millions de Kwh, cette batterie géante permet le stockage du courant lorsque la demande est trop faible pour utiliser toute l’électricité disponible sur le réseau. À titre de comparaison, 20mio de Kwh, c’est l’équivalent de 400’00 batteries de voitures électriques.
Quelques chiffres pour terminer
Ils sont impressionnants et résument à eux seuls l’ampleur du chantier aujourd’hui achevé:
- 900 MW de puissance, l’équivalent de la centrale nucléaire de Gösgen (1973)
- 6 pompes-turbines Francis de 150MW
- 425 m de chutes d’eau verticales
- 52 m de haut pour la salle des machines, et 194 de longueur
- 600 m sous la roche, c’est la profondeur où se trouve la centrale
- 14 ans de chantier
- 2 milliards de francs pour la réalisation
Et il y en a plein d’autres! Mais je te laisse les découvrir sur le site officiel de Nant de Dranse avec des photos juste incroyables de ce chantier hors normes!